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Je sortis de la forêt tant bien que mal, effectuant un large détour pour éviter la ville. Je finis par me perdre dans l'immensité de cet espace sauvage que j'avais pourtant cru apprivoiser, et finis par déboucher après plusieurs heures d'errance, sur la plage. C'était le crépuscule...
Epuisé, je m'effondrai sur le sable et fermai un instant les yeux, avant d'aller au bord de la mer et de m'asseoir en tailleur, mes yeux pourpre fixant pensivement les vaguelettes qui me léchaient les jambes, mouillant mon jean. Je pris alors conscience de ne pas m'être lavé depuis quelques jours. Toujours un peu absent, je me déshabillai et me préparai à sauter dans l'eau, lorsque mon reflet m'attira. Cela faisait un mois que je ne prêtais plus attention à moi ou à mon corps...
Je vis d'abord mes yeux, rouges comme de la braise. Puis je constatais enfin les changements d'un mois de vie sauvage...
Mon visage était devenu plus anguleux, tel celui d'un faucon, mes joues s'étaient légèrement creusées. Mes sourcils auparavant linéaires étaient devenus froncés, par habitude. Mais le plus saisissant était l'allongement de mes cheveux. Jadis mi-longs, impeccablement coupés à la hauteur des épaules, ils étaient maintenant beaucoup plus longs et raides. Je dus improviser une queue de cheval pour les maintenir en place. Je regardais de nouveau l'eau, et souris. Un sourire dépourvu de la moindre gentillesse, ou joie. Un sourire froid, satisfait à la vue d'un apparence qui me convenait mieux. J'étais devenu infiniment plus beau, mais d'une beauté terrible, sauvage, indomptable. Tel mon nouveau caractère, cette nouvelle force qui me permettrait de ne pas rater ma vie...
J'étais devenu obsédé par cette idée. Par le fait d'avoir pris finalement, enfin conscience que je n'étais rien, et que tout était encore à faire. Qui suis-je au fond? Un homme? Mais il y avait tant d'hommes... Je n'étais qu'une poussière sur cette Terre, qu' un atome devant l'immensité de la Terre, du Ciel, de l'Univers! Dénéiros Evans, rien qu'un nom, pour me différencier de la masse des humains...
Comment faire pour se démarquer? Comment faire pour sortir du lot commun des misérables d'ici-bas? Il faut les surpasser, prouver à tous sa valeur, sa supériorité, se faire reconnaître par les autres qui ainsi vous élèvent et vous reconnaissent comme un des meilleurs, comme le meilleur. Mais pour cela, il faut des qualités, une certaine puissance. Ces mêmes qualités ne viennent que de deux sources: le don ou le travail. On n'est beau, fort, intelligent ou autre par un don, le plus souvent héréditaire. Mais on peut aussi les acquérir par le travail, par l'entraînement, par l'abnégation, la persévérance. Des fois ca marche, des fois non. Il existe aussi de nombreux dons qui ne peuvent s'acquérir que par les gèns, et d'autres que par le travail. Ces dons, ces techniques, il faut en acquérir le plus possible, et celui qui en aura le plus s'élevera, dominera.
Mais pour l'instant, ou est-il, Dénéiros Evans? Qui est-il? Il n'est rien, rien d'autre qu'un lycéen, reconnu seulement comme un peu plus beau, un peu plus intelligent? La majorité des autres qui posséderaient ces petits dons s'en contenteraient, s'en serviraient auprès des autres, se contentant de petites glorioles. Mais pas Dénéiros. Lui a besoin de plus, il veut plus. Ces petites satisfactions qutodiennes ne lui servent à rien. Pour l'instant, il n'est pas plus avancé dans la vie qu'un autre.
*Moi qui voudrait tellement être le meilleur, réussir ma vie...*
En entrant dans ce lycée, il s'était détourné de ses objectifs. Ainsi, il avait cru se délivrer de ses peurs,de ses angoisses. Il avait cru aux idioties des autres, des plus faibles,, sur le bonheur. Il avait cru créer un équilibre, un monde autour de lui paisible, tranquille. Il avait cru être aimé, et il avait aimé. Il avait cru au bonheur. Ce bonheur, si fragile, si instable, et qui s'est brisé, qui a volé en éclats devant le retour implacable de la vérité...
Le bonheur, ce n'est pas être aimé ou aimer. Ce n'est pas profiter des basses satisfactions de la vie. Le bonheur, c'était quand on était au plus haut, et que l'on sentait les fortes sensations que procurent la vraie vie. Ca, c'est le vrai bonheur, l'apange des plus forts. Et pour y accéder, encore un fois, il avait besoin d'outils, de puissance. Pour l'instant, il n'est rien...
Pour l'instant...
*Je ne dois pas rater ma vie. Je ne dois pas rater cette occasion. Je ne peux pas.*
La nuit était tombée. Il verrait demain comment entrer au lycée et convaincre, rallier Mailysse à son plan...